Les Femmes savantes

Molière

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Les Femmes savantes de Molière
Date(s) :
à
Durée : 2h

Dans la maison de Chrysale, grand bourgeois parisien, les femmes ont pris le pouvoir. Sa femme, sa sœur, sa fille ainée sont folles de philosophie, de science, de poésie. Elles veulent se libérer du rôle que les hommes leur ont assigné : faire des enfants, s’occuper du ménage pour se consacrer entièrement à leur passion, le savoir. L’ordre familial est bouleversé. Ce sont des proies faciles pour Trissotin, leur maître à penser, escroc intellectuel cynique et profiteur, dont le but est d’épouser Henriette, la fille cadette, qui n’a aucun goût pour les choses de l’esprit et aime Clitandre. Quand la servante Martine, est renvoyée parce qu’elle fait des fautes de grammaire, le conflit éclate. Les hommes vont retrouver leur autorité en démasquant Trissotin.

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Notes & extraits

La femme est encore étonnée et flattée d’être admise dans le monde de la pensée, de l’art, qui est un monde masculin : elle s’y tient bien sage, elle n’ose pas déranger, explorer, exploser ; il lui semble qu’elle doit se faire pardonner ses prétentions littéraires par sa modestie, son bon goût ; elle mise sur les valeurs sûres du conformisme ; elle introduit dans la littérature tout juste cette note personnelle qu’on attend d’elle : elle rappelle qu’elle est femme par quelques grâces, minauderies et préciosités bien choisies … Il ne faut pas compter sur elle pour s’aventurer sur des chemins inédits. Ce n’est pas que les femmes dans leurs conduites, leurs sentiments, manquent d’originalité : il en est de si singulières qu’il faut les enfermer; dans l’ensemble, beaucoup d’entre elles sont plus baroques, plus excentriques que les hommes dont elles refusent les disciplines. Mais c’est dans leur vie, leur conversation, leur correspondance qu’elles font passer leur bizarre génie ; si elles essaient d’écrire, elles se sentent écrasées par l’univers de la culture parce que c’est un univers d’hommes : elles ne font que balbutier. Inversement, la femme qui choisit de raisonner, de s’exprimer selon les techniques masculines aura à cœur d’étouffer une singularité dont elle se défie ; comme l’étudiante, elle sera facilement appliquée et pédante ; elle imitera la rigueur, la vigueur virile ; mais elle se sera imposé de répudier tout ce qu’il y avait en elle de « différent ». Il y a des femmes qui sont folles et il y a des femmes de talent : aucune n’a cette folie dans le talent qu’on appelle le génie.
Simone de Beauvoir – Le deuxième sexe

En lisant ce texte de Simone de Beauvoir, j’ai vu en filigrane les visages de Philaminte, de Bélise et d’Armande, ces personnages de théâtre, ces figures de femmes qui, au XVIIème siècle, s’aventurent dans le domaine de la pensée et de l’art. Philaminte, refuse d’être une femme rangée et veut s’élever par l’esprit. Elle a une revanche à prendre sur les hommes. Pour elle, la guerre des sexes est déclarée :

Car enfin je me sens d’un étrange dépit
Du tort que l’on nous fait du côté de l’esprit,
Et je veux nous venger toutes autant que nous sommes,
De cette indigne classe où nous rangent les hommes,
De borner nos talents à des futilités,
Et nous fermer la porte aux sublimes clartés.

Philaminte s’essaie à l’écriture. Mais si elle entend surpasser la République de Platon en créant sa propre académie, elle n’ose lire ses vers devant Trissotin et préfère admirer ceux du ”maître”.
Armande, étudiante ”appliquée et pédante”, se veut pur esprit et s’impose de nier sa différence par le refus de l’idéal féminin imposé par les hommes, son rejet du mariage :

Que vous jouez au monde un petit personnage,
De vous claquemurer aux choses du ménage,
Et de n’entrevoir point de plaisirs plus touchants
Qu’un idole d’époux et des marmots d’enfants !

Bélise la visionnaire est plus baroque, plus excentrique, l’esprit ravagé par la lecture des romans, si singulière qu’il se pourrait bien que ses frères finissent par la faire enfermer :

Chimères, moi ! Vraiment ”chimères” est fort bon !
Je me réjouis fort de ”chimères”, mes frères,
Et je ne savais pas que j’eusse des chimères.

Elisabeth Chailloux