
La Chambre 100 (reprise)
Vincent EcrepontPrésentation
Et dire qu’il aura fallu attendre de frôler la mort pour oser se dire ces mots-là...
Quel sens donner à sa vie ?
Voilà la question qu’aborde avec pudeur Vincent Ecrepont à partir de témoignages recueillis en soins palliatifs. En évitant le piège du sentimentalisme, il réussit avec délicatesse une partition intime et joyeuse, dans laquelle il n’est question que de vie. L’intelligence de cette dramaturgie est de faire s’alterner émotions, coups de poing et sourires, face à une parole bouleversante qui résonne en chacun de nous.
Comme pressé par l’appétit de dire, chacun des personnages dévoile ce que la maladie a modifié de son désir de vivre, de s’ancrer différemment dans l’instant et de réajuster comme priorités de son existence. Cinq acteurs à fleur de peau portent avec brio ce texte que l’on reçoit comme un appel à se dire et à choisir sa vie.
Agnès SANTI pour La Terasse
Informations sur le lieu
La presse en parle
Une extraordinaire lumière de vie. / Avant-scène théâtre - mai 2017
A fleur de peau, les acteurs épatants de sincérité investissent leur rôle de porte-parole / Le Parisien
Un travail remarquable de pudeur et de sensibilité / La Croix
Vincent Ecrepont a tissé une partition délicate, lucide et rythmée, un texte composé avec retenue et justesse / La Terrasse
Le spectacle est beau, touchant, suspendu comme le sont les pietà / WebThéâtre
Distribution
Production La Compagnie A vrai dire accord / Les Déchargeurs - Le Pôle diffusion / Coproduction L’Avant-Seine, Théâtre de Colombes
Avec le soutien du ministère de la Culture et de la Communication / DRAC Nord-Pas-de-Calais – Picardie, la Région Hauts-de-France – Nord Pas de Calais - Picardie, le Conseil départemental de l’Oise, la Ville de Beauvais, le Théâtre national de Bretagne et l’ADAMI.
Multimédia
Notes & extraits
Pas de scène inscrite dans une « situation dramatique » réaliste, mais une succession de séquences dont l’architecture compose une théâtralité distanciée. Dès le prologue, les acteurs revendiquent le fait qu’ils prêtent leur parole à ceux qui en sont privés. S’amorce alors une bascule entre incarnation et énonciation qui n’exclut nullement l’émotion. Peu de dialogues. Le monologue intérieur est au service de la mise en jeu d’une solitude où surgit l’urgence de la prise de parole.
En transparence, la pièce aborde le désir de se raccorder à son nouveau corps, de se ré-accorder à un nouveau projet de vie. Cette reconstruction-là s’opère par la parole, par la prise de parole.
En ce sens, La chambre 100 parle plus de « mal à dire » que de maladie.
Vincent Ecrepont
Tout a commencé par un choc : celui de rencontrer des personnes que la conscience de la mort, de leur propre mort, avait ouvertes à une autre conscience de vie. C’était dans un service de cancérologie, lors d’un atelier d’écriture que je menais avec la Scène Nationale de Blois. Leur parole qui, dans un premier temps, m’avait déstabilisé m’a amené à m’interroger et me recentrer sur ce qui m’est essentiel.
S’est alors imposé une évidence : c’était ici qu’il faisait sens pour l’artiste que je suis de faire expression et création. J’ai donc pris la décision d’axer mon travail autour de différents ateliers d’écriture en milieu hospitalier fondés sur l’importance de la transmission. De 2003 à 2005, des patients se sont confiés dans l’idée de se donner à entendre, de donner à entendre ce que l’on tait trop souvent : la maladie qui modifie le regard porté sur son propre corps… qui opère certaines mutations dans la perception de l’essentiel et suscite parfois le désir de s’ancrer autrement dans l’instant.
Une fois ces témoignages recueillis, je les ai laissés résonner avec ma propre histoire pour m’inscrire pleinement dans un acte créatif. Car c’est bien dans une écriture théâtrale que je me suis engagé et non pas dans une pièce-reportage limitée à une accumulation de paroles de patients. Ce théâtre-là n’a aucun message moral à délivrer. Il invite chacun à porter un regard sur son quotidien pour reconsidérer ses propres priorités de vie.
Vincent Ecrepont
LA VIEILLE FEMME – Je ne m’étais pas confessée depuis 1945, autant dire qu’il en a eu du boulot, Monsieur le curé. Je lui ai dit : « Je n’ai pas tué, mais tout le reste, je l’ai fait… ou presque ! ». En cinquante-sept ans de mariage, je lui en ai fait voir à mon mari... Pourtant je l’aimais, si vous saviez comme je l’aimais, mais c’était plus fort que moi, tous les jours il fallait que je l’enquiquine pour des détails sans importance, pour des choses qui n’étaient pas faites, ou des choses qui n’étaient plus à leur place… comme si les choses devaient avoir une place !...
Quand il est parti, je me le suis gardé une semaine à la maison, à l’époque on pouvait. Ah, il était fin beau dans son costume de mariage alors je m’arrangeais aussi, un peu, et je lui parlais, je lui disais tout ce que je ne lui avais pas suffisamment dit durant ces cinquante-sept années.
Est-ce que vous avez déjà eu envie de redonner la vie à quelqu’un ? Pour lui dire quoi ? Pour vous entendre dire quoi ?