
Don Juan, le retour
Gérard SavoisienPrésentation
Je vais le faire parce que chacune n’attend que cela
Don Juan s’enfuit des enfers, intrigué par le tour que prennent apparemment les relations hommes-femmes. Ayant perdu son fidèle valet il se retrouve seul. Cette solitude à laquelle il va devoir s’habituer le conduit à porter un regard tour à tour amusé, incrédule et cynique sur une société désabusée qu’il ne peut plus choquer, qui accessoirise l’essentiel et essentialise l’accessoire…
Informations sur le lieu
Distribution
Coréalisation Les Déchargeurs / La Lune Opaline
Multimédia
Notes & extraits
Depuis Tirso de Molina, créateur du premier Don Juan Tenorio, en passant par le Don Juan ou le Festin de pierre de Molière et le Don Giovanni de Mozart et Da Ponte, le personnage a traversé brillamment toutes les époques. Il est à la fois l'homme à femmes et le génie athée sans scrupule que la morale rejette mais dont les exploits fascinent. Il semble que tout ait été dit sur lui. Alors pourquoi revenir sur un mythe et lui adjoindre de nouvelles aventures ?
Tout simplement parce que les époques changent. Notre société plus permissive n'a pas le même engouement pour le personnage des siècles passés, car les Don Juan pullulent et le mal s'incarne de nos jours plus violemment et plus insidieusement que dans l'abandon le soir des noces de quelques jeunes femmes énamourées. J'ai donc imaginé un Don Juan revenant au XXIè siècle et découvrant, étonné, le changement des mœurs, la libération de la femme dans certains pays, son asservissement dans d'autres, ainsi que l'athéisme grandissant d'un côté et le religieux de l'autre. Je lui ai adjoint un absent, son serviteur, mélange de Sganarelle et de Leporello, qui n'est plus là pour s'offusquer. Don Juan n'a plus ce contrepoint de bon sens, cet allié involontaire qui se répand en le médisant – tout en subissant son indéniable charisme. Or que devient-on à notre époque où le paraître est roi, où la "com" et la "pub" sont plus nécessaires que le savoir, le faire et le savoir-faire ? C'est en effet le faire-savoir qui est devenu le maître mot de toute action, création ou réflexion. Privé de son serviteur qui fait ce travail de relations publiques, Don Juan est perdu. Dans ma pièce, il va passer son temps à le recréer, à le réinventer et va même jusqu'à demander au public de lui faire une contre publicité afin que le mythe continue à perdurer.
Pièce pour un homme seul, c'est-à-dire pièce pour un seul acteur, mais aussi pièce pour un solitaire, le personnage se met à nu et va revivre son destin auquel il ne pourra éternellement échapper. C'est donc un personnage moderne, cynique mais aussi fragile que je vous invite à découvrir dans Don Juan, le retour.
Gérard Savoisien
Dj, le retour voilà une manière d’aborder le fameux mythe avec humour et distance.
Le texte de Gérard Savoisien va pour moi dans ce sens. Car s’il revient, et c’est la première belle idée de la pièce, Don Juan ne peut revenir que dans un théâtre, lieu de fantasme et d’illusion. L’écho de sa gloire d’antan ne raisonne que pour lui, et même son fidèle Sganarelle, dont il prenait tant de soin à faire son contradicteur, n’est plus là pour lui opposer sa morale et sa figure scandalisée. Don Juan, le retour n’est pas un monologue. C’est un dialogue constant avec un auditoire à reconquérir, qui aujourd’hui ne s’offusque plus de rien. Il ira même jusqu’à jouer la folie, entraînant avec lui son valet invisible dans une course un brin schizophrène vers un destin à la James Dean. Mais qu’on ne s’y trompe pas : ce Don Juan qui se donne en spectacle n’a rien perdu de sa clairvoyance et de son désespoir. Il n’est surtout pas naïf, et il en fera encore la démonstration en quittant ce monde comme il l’aura voulu, quand il aura cessé de s’amuser. S’il a cru à une nouvelle chance, sa nature profonde aura encore raison de lui : ce n’est toujours que dans le mythe et dans la mort que Don Juan se sait le plus vivant.
Eric Rouquette
Je reviens de cet enfer glacé pour faire peur de nouveau aux maris fragiles, aux fiancés mous. Pour désespérer les pères impuissants. Et faire jouir les femmes. Toutes les femmes. Les belles, les laides. Les jeunes, les vieilles. Les grands échalas, les petites potelées. Les maigres à faire peur, les grasses trop pulpeuses. Les clitoridiennes, les vaginales. Les entreprenantes envahissantes et les timides oisives. Celles qui portent leurs seins en triomphe et celles qui, la poitrine affaissée, regardent leur miroir comme un ennemi. N'ayez crainte, les moches, les âgées, je viens vous aimer, vous aussi, comme les belles et jeunes guerrières que je vais soumettre. Et bien sûr, je vais vous détruire. Car si je vais profond, loin et haut, c'est pour mieux vous abandonner, vous faire retomber en réalité, comme on retombe en enfance, gâteuses de sexe, éperdues.